Bâtiment Adolphe Pinard

La naissance de la maternité

22 mai 2019

© Clément Guillaume

L’ancienne maternité Adolphe Pinard représente un des bâtiments les plus emblématiques de Saint-Vincent-de-Paul. D’autant que son histoire comme son futur restent étonnamment liés à la petite enfance.

À partir de 1930, la vocation sociale originelle de l’hospice cède la place à une orientation plus spécifiquement hospitalière. D’importantes constructions sont lancées pour héberger des disciplines médicales de plus en plus spécialisées et leurs équipements. Elles sont édifiées aux dépens des derniers jardins du site de Saint-Vincent-de-Paul, supprimant par là-même les axes historiques nord-sud et est-ouest qui organisaient ces espaces de verdure.

Première de ces nouvelles constructions, une grande maternité est réalisée à partir de 1930. Elle reçoit le nom d’Adolphe Pinard (1844-1934), obstétricien et député de la République entre 1919 et 1928, père de la puériculture française. Pinard est notamment un fervent partisan de l'allaitement au sein. Il affirme que « le lait de la mère appartient à l'enfant » et condamne l'usage de la tétine. La paternité de la première école de puériculture de France lui est également reconnue. Issu d’une humble famille de paysans champenois, Pinard symbolisera même dans l'hagiographie républicaine l'histoire « de tous ces hommes venus des couches modestes de notre peuple qui, grâce à leur mérite personnel, à leur santé et à leur courage, atteignent vite le plus haut sommet de la hiérarchie sociale (1) » et la montée des « couches sociales nouvelles » dont Gambetta annonçait l'avènement en 1872.

Hôpital Saint-Vincent de Paul : la maternité Adolphe Pinard, vues de la cour intérieure. Archives de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris, Documents figurés, 3Fi-4-Saint-Vincent-de-Paul.


La maternité qui porte son nom est dessinée par l’architecte Félix Debat (1867-1938). Elle se composait de trois ailes disposées autour d’une cour centrale, dotées de planchers de béton armé et habillées de briques jaunes apparentes. La première de ces ailes, située en face de l’ancien noviciat de l’Oratoire, comportait un sous-sol, un rez-de-chaussée et deux étages couverts d’un toit à deux pentes. Les deux autres ailes communiquant avec la première via une galerie et ne comptaient qu’un rez-de-chaussée et un étage, le tout couvert en terrasses. Chaque étage se composait d’une suite de chambres et de pièces de part et d’autre d’un couloir de circulation central.

À sa création, largement commentée par la presse spécialisée, la maternité incarne l’entrée de l’hospice dans sa nouvelle phase d’évolution. Par la fonctionnalité de ses distributions, d’abord, avec des cours anglaises assurant aux sous-sols un généreux éclairage et une abondante aération. Par l’efficacité de l’organisation fonctionnelle, ensuite, et de ses instruments et équipements, les plus en pointe de l’époque. Par sa monumentalité, enfin, et son architecture de brique et béton, sobre et recherchée à la fois.

Le seul changement d’importance que connaît la maternité durant la première moitié du XXe siècle a lieu en 1942 avec la pose d’un toit à deux pentes sur les deux ailes latérales. En 1969, pour répondre aux besoins grandissants du site, un centre d’accueil est inauguré. Le nouvel immeuble conçu par l’architecte Georges Mathy, relie les deux ailes du bâtiment Pinard – la division des filles et la division des garçons – fermant ainsi la cour sur quatre côtés. Il offre, au rez-de-chaussée bas, 112 lits et berceaux supplémentaires, un centre médical de triage pour l’examen des enfants reçus quotidiennement, ainsi que des bureaux pour le service social de l’établissement. Les rez-de-chaussée haut abrite des réfectoires, préaux et parloirs. Au-dessus de ce socle, trois étages sont divisés en chambres communes de dix lits ou en boxes individuels.

Au terme de 85 ans d’activité, la maternité Pinard ferme ses portes fin 2011, suite à l'ouverture du nouveau « Pôle périnatal Port Royal », qui fusionne les activités des trois centres de maternité-périnatalogie de Saint-Vincent-de-Paul, Baudelocque et Port-Royal. L’histoire de ce bâtiment ne s’arrête pas là pour autant. Préservé et reconverti en équipement public mutualisé dans le cadre du projet Saint-Vincent-de-Paul, il accueillera un gymnase, une école maternelle et une crèche, pérennisant ainsi en quelque sorte sa vocation initiale d’un lieu au service de l’enfance et s’enrichissant d’une nouvelle dimension d’ouverture au public.

(1) Louis Portes, Éloge du Professeur Adolphe Pinard (1844-l934), prononcé à la clinique Baudelocque le 12 novembre 1943, Paris, Masson (1943).

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